L’articulation acromio-claviculaire, comme son nom l’indique, relie l’acromion, une des parties de l’omoplate, et la clavicule. C’est une articulation peu mobile, « plate », et qui comprend comme la majorité des articulations, du cartilage recouvrant les extrémités osseuses, et une capsule articulaire, renforcée (sur le dessus de l’articulation) par un ligament acromio-claviculaire.

La clavicule est donc « attachée » à l’omoplate par cette articulation. Elle est aussi reliée à une autre partie de l’omoplate, la coracoïde, par 2 ligaments solides, les ligaments coraco-claviculaires (le « ligament trapézoïde » et le « ligament conoïde« ). En dedans, la clavicule est reliée au sternum par une articulation similaire, l’articulation sterno-claviculaire.

L’articulation acromio-claviculaire est une des articulations de l’épaule, ou ceinture scapulaire. Elle y joue un rôle non négligeable, et ses pathologies impacteront l’ensemble du fonctionnement de l’épaule.

Anatomie de l’articulation acromio-claviculaire

Cette articulation peut entraîner 2 types de problèmes :

  • L’arthrose (ou arthropathie) acromio-claviculaire : Il s’agit d’une altération du cartilage de l’articulation.

Cela peut provenir du vieillisement, Le point important est que dans la très grande majorité des cas, cette arthrose « spontanée » ne s’accompagne pas de symptômes. Par exemple, une grande partie des patients de plus de 70 ans auront une « arthrose » de cette articulation (décrite sur les radiographies par exemple). Cela est normal la plupart du temps, et présent des 2 côtés. Le chirurgien à l’examen clinique pourra en palpant le patient savoir si vraiment l’arthrose explique les douleurs du patient.

Dans certains cas par contre, l’articulation peut être abimée par un choc sur le côté de l’épaule (chute en 2 roues, accident de sport tel que le judo ou le rugby). Le choc aura « comprimé » violemment l’articulation, et lésé le cartilage, et parfois les os situés sous le cartilage. Ces situations entraînent plus de douleurs, parfois résistantes.

  • La disjonction (ou luxation) acromio-claviculaire : Il s’agit d’une lésion des ligaments reliant la clavicule à l’omoplate.

Cela survient après un traumatisme sur le côté de l’épaule, c’est à dire similaire à ceux pouvant entraîner une arthropathie acromio-claviculaire, mais souvent plus violent (chute en ski ou en 2 roues à forte vitesse, plaquage au rugby…). Plus la force du choc sera importante, plus les ligaments seront abimés.

On décrit 5 stades à cette pathologie (Classification de Rockwood) :

  1. Pas de déplacement des os entre eux, simple contusion de l’articulation. Équivalent à une entorse bénigne.
  2. Le ligament acromio-claviculaire seul est déchiré, les ligaments coraco-claviculaires sont « étirés » sans être rompus. Le bras « tombe » un peu, mais la clavicule reste « en face » de l’acromion, avec un déplacement de moins de 50% de son épaisseur.
  3. Les 3 ligaments sont « déchirés ». La clavicule est déplacée de 50 à 100% de son épaisseur, donc reste en partie « en face » de l’acromion.
  4. La clavicule part en arrière, par rapport à l’acromion, mais en vue de face de l’épaule on a l’impression qu’elle est toujours bien « en face » de l’acromion.
  5. Les 3 ligaments sont rompus, et la clavicule est déplacée de plus de 100% de son épaisseur. La clavicule « rentre » dans les muscles qui sont autour de l’articulation.

Différents stades de Disjonction Acromio-claviculaire. Plus le stade est élevé, plus les lésions des ligaments sont importants.

  • Interrogatoire : Les patients vont décrire une douleur située autour de l’articulation acromio-claviculaire, et souvent un traumatisme avec choc sur le côté de l’épaule. Ils décriront des sensations de bras lourd ou « mort », avec des fourmillements dans le bras dans les cas de disjonction. Il peut y avoir aussi des sensations d’accrochage, ou de douleurs aigues dans des gestes précis. L’histoire de la maladie et les symptômes seront recueillis précisément par le médecin.
  • Examen clinique : La palpation de l’articulation réveillera la douleur. Des tests cliniques particuliers seront réalisés, c’est à dire des manoeuvres mobilisant de façon précise l’épaule et qui, en réveillant une douleur, indiquent à l’examinateur que l’articulation acromio-claviculaire est en cause (Test d’adduction contrariée en particulier). On recherchera une instabilité de l’articulation, qui signera une disjonction. Enfin l’examen clinique se portera plus largement sur le patient pour éliminer un autre diagnostic associé.
  • Examens complémentaires : Une simple radiographie de face de l’épaule est suffisante pour confirmer le diagnostic. On recherchera un caractère irrégulier des surfaces articulaires (arthrose) et le fait que la clavicule et l’acromion ne sont plus « en face » (disjonction). On fera aussi un examen en 3 dimensions (IRM ou arthroscanner de l’épaule) en cas de décision chirurgicale, pour éliminer un autre diagnostic associé.

Aspect clinique d’une disjonction acromio-claviculaire de stade 5 droite. Le bras droit « tombe » car n’est plus relié à la clavicule.


Disjonction acromio-claviculaire de stade 5. La clavicule est complètement « séparée » de l’acromion, signant une lésion complète des ligaments. Radiographie de face d’épaule droite.

Arthropathie acromio-claviculaire : irrégularité de l’extrémité de la clavicule et calcifications au sein de l’articulation (flèche). Radiographie de face d’épaule droite.

  • Arthrose acromio-claviculaire :

on va essayer les différentes options du traitement médical pour diminuer les douleurs, et permettre au patient d’améliorer la fonction de son épaule. On va faire de la kinésithérapie, pour diminuer l’inflammation et la douleur (physiothérapie), pour apprendre à utiliser différemment son bras, pour travailler les mobilités de l’épaule…Le patient prendra des antalgiques et des anti-inflammatoires en cures courtes. La natation est aussi un excellent traitement. Ensuite, si la gène persiste, on fera une infiltration de cortisone, éventuellement sous contrôle radiographique, au niveau de l’articulation acromio-claviculaire. Ce traitement doit durer 3 à 6 mois avant de conclure à son inefficacité éventuelle. Dans les cas où le patient garde une gène importante, incompatible avec une vie personnelle ou professionnelle normale, on discutera une intervention chirurgicale sous arthroscopie, l’arthroplastie acromio-claviculaire, dont les détails sont exposés ICI.

  • Disjonction acromio-claviculaire :

Pour les stades 1, 2 et 3, le traitement est d’abord toujours médical. Pas de chirurgie en urgence dans ces cas là. On va essayer d’accompagner au mieux la nature pour rétablir l’anatomie « normale »au mieux. L’immobilisation conseillée après un traumatisme est de 4 semaines avec une attelle « coude au corps ». Cette attelle servira à soutenir le poids du bras, quand le patient sera debout ou assis. Le but étant de faire cicatriser au mieux les ligaments coraco-claviculaires et acromio-claviculaire. On va ensuite utiliser les mêmes techniques que pour l’arthrose, pour essayer de revenir au plus près de l’épaule pré-existante au traumatisme. Dans la grande majorité des cas, après une kinésithérapie plus ou moins longue( 3 à 6 mois), cela suffira pour reprendre une vie normale, mais les patients pourront garder une gène peu invalidante, notamment dans les exercices intenses et répétés. Si les patients restent gênés au delà de 6 mois, il faudra revoir le chirurgien pour réévaluer les choses et notamment rechercher un autre diagnostic (disjonction de stade plus élevé, arthropathie acromio-claviculaire, épaule douloureuse et instable, conflit sous-acromial…).

Pour les stades 4 et 5, le traitement sera chirurgical en « urgence » si le diagnostic est fait dans les 10 jours. On parle alors de disjonction acromio-claviculaire « aigue ». Les modalités de l’opération sont décrites ICI. Ce délai de 10 jours est discutable mais il n’existe pas de preuves suffisantes dans la littérature scientifique pour savoir quand on passe à une disjonction « chronique ». Le Dr Bessière a fait le choix de limiter les indications chirurgicales à ce délai de 10 jours, et uniquement si les patients sont non fumeurs, ou au moins cessent tout tabagisme après l’intervention. Le but de l’intervention est en effet de « rapprocher » la clavicule et l’omoplate pour permettre aux ligaments du patient de cicatriser. Cette cicatrisation est beaucoup plus aléatoire chez les patients fumeurs (la nicotine diminue le diamètre des vaisseaux) et chez les patients opérés au-delà de 10 jours.

Pour une disjonction de stade 4 ou 5 vue au-delà de 10 jours, on tentera comme pour les stades 1,2 et 3 un traitement médical. Dans près de la moitié des cas, dans l’expérience du Dr Bessière, cela suffira pour récupérer une épaule compatible avec la vie « habituelle » des patients. Ils garderont dans les stades 5 une déformation (classique « touche de piano »), mais bien tolérée. Au contraire, quand le patient reste gêné de façon importante, au moins 4 mois après le traumatisme, il faut envisager une intervention pour disjonction acromio-claviculaire chronique, appelée ligamentoplastie acromio-claviculaire, dont les détails sont expliqués ICI. Dans ces cas là l’idée est de « remplacer » les ligaments du patients, qui ne cicatriseront plus jamais, par une reconstruction de ceux-ci grâce à un greffon prélevé sur le patient lui-même.